vendredi 26 septembre 2008

Chapitre 16 : Le Feu de Saint-Elme

Inès regardait l’eau de la mer depuis la villa de Marco, d’où la vaste étendue bleue était visible. Le vent secouait doucement les arbres. Au loin, au niveau où ciel et mer se rejoignaient pour former l’horizon, de sombres nuages étaient visibles. La tempête prévue pour le lendemain arrivait. Le Bâton Noir était en sûreté, et les Grands Trésors réunis par les Fienpoti avaient été placés en un lieu sûr. Pierre ne le leur avait pas dit où ils étaient entreposés, afin que si la Peur les capture ils ne puissent pas révéler l’emplacement de la cachette. Inès joua un instant avec sa baguette pointée en direction de la mer, telle une déesse de l’eau. Elle continua sa tranquille contemplation de l’horizon toujours aussi calme que l’eau d’un ruisseau s’écoulant lentement au cœur d’une forêt. Fabien la rejoignit, le regard tourné en direction des nuages, puis vers les arbres qui se balançaient au gré du vent qui commençait à souffler. Les arbres étaient heureux, ne ressentaient en rien le froid de l’hiver, mais ils sentaient la tempête arriver. Sentir ce que les arbres ressentaient en quelque sorte était une chose bien étrange. Le vent froid, apportant la tempête, fit tourbillonner quelques feuilles mortes restantes de l’automne si lointain, jamais ramassées, et le jeune Fienpoti de la Flore rit doucement. Nul doute quant au responsable de ce mouvement de feuilles. Nedjma vint, regarda à son tour les nuages menaçants, puis regarda la colline entourant le littoral. Tel la Terre, Nedjma était d’une grande sagesse, et elle sut qu’elle allait devoir préparer quelque chose afin d’aider ses amis à ne pas être omnibulés par la Peur, même si cela était plus que compréhensible. Enfin Alice arriva, d’un pas vif, fixa quelques instants l’horizon, puis se tourna vers les trois autres jeunes mages. Le soleil se levait, ses rayons éclairant son visage. Alice demanda si sa baguette d’ébène avait été vue, mais la réponse fut négative. Pierre les observa, se demandant quelle serait l’étendue de leurs pouvoirs dans six mois, dans un, deux et cinq ans. Il avait faillit à sa mission en les laissant pendant quelques jours, et même s’il savait ne pas être responsable, il s’en voulait. Heureusement qu’ils avaient rencontrés les Sourçois, le Peuple Magique, le roi Firion Nollio et Hélène Dudragon ! L’ambassadeur avait entendu Alice s’enquérir de sa baguette, mais lui savait où elle était contrairement aux jeunes sorciers. Il quitta la fenêtre donnant sur la terrasse, et reprit ce qu’il faisait.

Thierry et sa sœur Coralie quittèrent leur maison, et prirent le chemin allant en direction du Portail. Ils empruntèrent le « Boulevard », chemin assez large faisant le tour de Terlatour, longeant à certains endroits la frontière entre Terlatour et le reste du Monde de la Terre. Ils passèrent à côté de maisons, et aperçurent l’Atelier de la Forêt, accessible par un chemin descendant. Ils arrivèrent en vue du cœur du hameau, et traversèrent un petit pont sous lequel un autre chemin allait vers la Tour et trois autres habitations. Un chemin permettait de descendre du boulevard en hauteur à cet endroit, et d’arriver directement sur le chemin franchit par le pont, et d’arriver sur la place où se tenait le Portail. Un soldat le la Peur passa, ne daignant même pas les regarder. Mais les deux adolescent n’en tirent pas rigueur, et en furent même soulagés. Il avait mieux être ignorés par les serviteurs du Sorcier des Ténèbres. La Maison de Terlatour, bâtisse faisant office de petit Hôtel de Ville, de salle de réunion, d’Hôtel de Poste, et de centre administration avec l’Etat Armonois. Une petite boutique vendant de tout, alimentaire, papeterie, droguerie, et autres. Coralie acheta des paquets de feuilles pour son ordinateur, tandis que son frère s’octroya le droit d’acquérir un petit paquet de friandises qu’il comptait partager avec sa sœur. Le soleil se couchait, et les petits lampadaires électriques s’allumèrent. L’ensemble des sentiers de Terlatour étaient éclairés. Ils récupérèrent leurs bicycles qui venaient seulement d’être révisés, et reprirent le Boulevard. Le sentier où leur maison donnait était éclairé par des luminions, enfermant la forêt du Montaiguet à Terlatour dans une obscurité reposante en n’éclairant que le petit chemin. Malgré la présence de soldats de la Peur, la vie à Terlatour n’avait été guère été perturbée, si ce n’est la limitation des déplacements hors du hameau caché des terriens. Les deux adolescents songèrent à leurs amis, espérant comme plusieurs fois par jour que leur quête n’échoue pas.

La première moitié de la journée s’écoula paisiblement aux Trois-Îles. Les Fienpoti se reposèrent dans la villa, à l’écart de toute agitation. Alice retrouva son bâton, à l’endroit où elle l’avait posée. Pourquoi l’avait-elle manquée plus tôt dans la matinée ? Elle regarda les quelques motifs peints de couleur argenté sur le bois, représentant des arabesques. Elle regarda avec ses amis les quelques peintures faites par Marco lui-même, à ses heures perdues, rares moments où il pouvait quitter le monde du gouvernement pour celui de sa vaste demeure. Le déjeuner se passa tranquillement, et l’après-midi également. Pierre leur expliqua en profondeur le système politique de l’Archipel, puis après deux heures de conversation leur fit s’exercer un peu. L’ambassadeur ne put s’empêcher d’écarquiller des yeux tout au long de l’entraînement, tandis que plantes, animaux, et feuilles mortes subissaient les sorts des Fienpoti. Les plantes furent vivifiées, les feuilles volèrent en tout sens, les animaux blessés guéris. Un rouge-gorge, légèrement blessé à une aile, put rejoindre son nid bien plus rapidement que si les jeunes sorciers n’étaient intervenus. Ce fut vers les dix-sept heures que la situation évolua. Les nuages arrivaient sur la ville, les éclairs étaient visibles. Quel sensation étrange d’entendre le grondement lointain du tonnerre, tout en voyait au-dessus de soi un ciel bleu sans aucun nuage. Dix neuf heures sonnèrent, marquant la douzième heure depuis le réveil des Quatre Sorciers aux Quatre Pouvoirs. Tout semblait calme.

Tout semblait calme dans la forêt du Continent, où la Peur était arrivée une demi-heure auparavant. Elle venait de réfléchir à ce qu’il convenait de faire. Vers dix-neuf heures trente, elle apparut devant le bâtiment, bien gardé. Sa visite était attendue. Se téléporter pourrait être une solution efficace, mais cela ferait trois fois rien qu’un une heure, et même si ses ressources étaient puissantes, le Mage Noir savait qu’il aurait certainement à user de ses pouvoirs à de multiples reprises. Les gardes furent propulsés contre les murs, et la Peur, qui après avoir reçu cinq balles dans le corps, décida d’ôter la vie à deux autres lui barrant le chemin. Le large et court couloir menant à la salle des Trésors fut traversé en quelques instants, et la porte solidement fermée fut détruite en une minute. Beaucoup d’énergie magique fut utilisée par le Mage Ténébreux, mais cela en valait la peine. Ce qu’il croyait être le Bâton noir fut retiré par ses soins du présentoir vitré où il était entreposé, et il se téléporta dans la forêt. La téléportation était somme toute fatigante, même pour lui. Le parcours du combattant qu’il avait effectué était d’ailleurs un peu moins épuisant qu’une téléportation. S’il ne s’était téléporté à plusieurs reprises, il serait encore en pleine forme. Mais là un peu de repos pouvait être le bienvenu. Les balles sortirent seules de son corps. Au total, elles étaient non pas cinq, mais sept, deux de plus s’était ajoutées. Même ce monde moderne n’avait d’armes puissantes contre lui. Voilà où menait une politique de paix et non violente. Avoir des armes bien moins puissantes que sur la Terre. Mais il avait le Bâton Noir, et dès le lendemain il irait à la rencontre des Fienpoti, les capturer seul, tuer ce maudit Pierre, prendre les Grands Trésors en leur possession, et ensuite à Fept pour rallier le monde d’Heucalia. Le temps passa, le soleil hivernal couché depuis longtemps finit par se lever. Ou plutôt finit par éclairer faiblement les Trois-Îles, la lumière ayant peine à filtrer à travers les nuages noirs. Les éclairs ayant illuminés la cité toute la nuit furent encore plus nombreux. Le Sorcier deux fois millénaire se remémora l’époque où le train magnétique n’était même pas dans les pensées des habitants qui se déplaçaient à dos de cheval, et où des bateaux à voile reliaient les quatre villes distinctes à l’époque de Gerond, des Rochers devenu des Consuls, la Plage Jaune devenu le Continent, et Routionasse. Il avait tué cinq dirigeants en deux millénaires, et gouverné ces contrées durant trente années cumulées. Bien souvent, les Fienpoti arrivaient rapidement, la téléportation palliant à la lenteur des moyens de locomotion de l’époque. Mais le temps qu’ils apprennent ce qui se passait, et c’était un mis de règne sans encombres. Il était huit heures du matin, et les premières gouttes de pluie s’abattirent sur la capitale.

Les Fienpoti s’éveillèrent à sept heures du matin. Une demi-heure plus tard, ils prirent un bus en correspondance avec le Tri-Train. A huit heures ils étaient dans le bureau de Marco. Pierre leur avait conseillé de ne rien prendre sur ceux, afin d’avoir une liberté de mouvement si la Peur venait. Même les baguettes avaient été jugées inutiles, car se focaliser sur un point n’était guère utile quand on combattait un sorcier aux telles ressources. Alice, dans sa hâte matinale, avait laissée sa baguette noire dans la poche de son manteau d’hiver. Elle ne s’en était d’ailleurs toujours pas rendu compte. Bernard rejoignit le Consul des Mages, et ils patientèrent tout en parlant du piège dans lequel le Mage Noir était tombé. Il avait pris le faux Bâton Noir, et ne s’était visiblement pas rendu compte du subterfuge. Le Sorcier des Ténèbres apparut au centre de la pièce, reposé de son escapade de la veille. Il bloqua toutes les issues, et immobilisa toutes les personnes présentes. Il arborait un sourire avenant et chaleureux, trop chaleureux. Il tenait dans sa main gauche le faux Bâton Noir, et se réjouissait d’avoir dans la même pièce les deux consuls qu’il voulait, mais aussi les Quatre Sorciers et Pierre Monbikand qu’il n’aurait même pas à rechercher par la suite. Il allait enfin avoir tout ce qu’il désirait. Enfin ! Le Sorcier Maléfique ne put s’empêcher de rire de la position de Marco, qui se tenait debout, un bras tendu en avant. Les Quatre Sorciers aux Quatre Pouvoirs savaient que le sort, même « fixé », devait être plus ou moins maintenu, et cela engendrait une mobilisation d’une partie tout de même assez conséquente des pouvoirs magiques. D’ailleurs, ils eurent même l’impression que les bouts de leurs doigts bougeaient, de un ou deux millimètres, mais bougeaient quand même. La Peur déclara : »Bien. Je vois que vous vous êtes tous réunis ! Bien… Comme vous le savez, j’ai le Bâton Noir, ainsi que le Cœur de l’Océan. Mais le Triangle des Trois Forces, le Cristal Eternel ainsi que l’Arbre d’Or ne sont pas en ma possession. Or, j’aimerai me rendre à Heucalia, et il me faut tous les Grands Trésors. Alors les gentils sorciers vont me donner les Grands Trésors ». Il commença à s’approcher de Pierre lorsqu’il fit tomber la copie du Bâton Noir qu’il venait de sortir d’une poche de sa veste. Il roula sur le carrelage, et passa sous un fauteuil. La Peur poussa la chaise, et ne vit pas le faux Bâton Noir qui était devant son pied. Il marcha dessus, et le brisa. Un Grand Trésor ne pouvait être détruit aussi facilement, et d’ailleurs aucun n’avait jamais été abîmé. Il contempla les deux morceaux, puis se tourna vers les mages. A cet instant, les Fienpoti brisèrent d’un coup le sort qui les immobilisaient, et lancèrent quatre sphères ensemble en direction du Mage Ténébreux. Celui-ci passa à traves une vitre. Quelques instants plus tard, il revint par téléportation dans le bureau, assez fâché. Alice prit conscience d’avoir sa baguette, et la sortit tandis que Pierre et Marco, eux aussi libérés, tentaient d’immobiliser la Peur. La Fienpoti du Feu lança un sort avec, pour voir si cela pourrait l’aider à concentrer les pouvoirs sur le corps de leur ennemi. Mais le sort fut concentré bien plus qu’elle ne s’y attendait, et le Sorcier Maléfique passa cette fois-ci par la porte, avant de revenir. Il blessa Alice, dont la baguette s’orienta en direction de la baie vitrée brisée au centre, et le sort qu’elle s’apprêtait à lancer pulvérisa le verre en mille morceaux. Elle riposta, et ce fut un trou dans un mur qui attira l’attention du sorcier Noir. Comment une simple baguette pouvait-elle autant concentrer l’énergie magique ? Les Fienpoti s’alignèrent, et lancèrent un puissant sort combiné sur leur ennemi, qui fut immobilisé quelques instants. Jamais ils n’avaient réussi à ralentir ainsi la Peur ! Mais celle-ci se libéra au bout de cinq secondes, avant même que les Quatre Sorciers n’eurent le temps de réfléchir à quoi faire, et ce fut à leur tour d’être projetés par la baie, ou du moins l’endroit où elle se tenait quelques minutes plus tôt. En tombant, ils reçurent la forte pluie, et virent les éclairs s’abattre sur le continent. Et le jardin exotique s’offrait à eux, la grande serre étant visible. Puis ce fut le noir.

La Peur regarda en direction du vide. La vue de la capitale s’étendant à ses pieds, et surtout la même vue qu’il avait partagé avec les Fienpoti en tombant lui aussi par cette ouverture peu avant. Il s’était téléporté alors que le sol se rapprochait… Et il ne faisait nul doute que les jeunes quatre Sorciers aux Quatre Pouvoirs avaient fait de même. Mais où s’étaient-ils téléportés ? Le Mage Noir évalua la situation, et se dit que les Fienpoti n’iraient pas loin, surtout pas avec leur maître entre ses griffes, ainsi que l’un des deux consuls. Il avait immobilisé de nouveau les deux hommes, ne se laissant cette fois-ci pas distraire par d’autres sorts à lancer. Un petit bouclier empêchait toute entrée dans le bureau, et des employés regardaient le Mage Noir se délecter de la situation.

Hélène regarda Saint dragon depuis sa chambre. La terrasse où Kotoin avait jeté un chat, un dragon, et un homme sauvé par les Fienpoti était un bon point de vue sur la cité entre le sol et les arbres. Les réparations avançaient rapidement, et deux jours heure pour heure après l’attaque du serviteur de la Peur les mailons que très peu brûlées voyaient les travaux sur le point de s’achever. Les opérations plus lourdes prendraient davantage de temps à se terminer, mais avançaient à un rythme soutenu. La princesse se rendit à l’écurie royale, et prit sa jument favorite, Aurore. Elle prit la route qui s’enfonçait dans la forêt et la suivit sur quelques kilomètres avant de tourner sur un chemin qui se dirigeaient vers le temple aperçu par les Fienpoti deux jours plus tôt lorsqu’ils virent la forêt du ciel. Le temple était entouré par les sept maisons composant le hameau de Pins-le-Temple. Elle fut saluée par les habitants qui circulaient à l’extérieur, et ceux-ci, voulant initialement s’adresse à elle pour avoir les dernières nouvelles de Saint dragon, se ravisèrent et reportèrent a après les questions lorsqu’ils la virent faire ralentir sa jument que quelques mètres avant la porte du temple, manquant d’un mètre de cogner contre celle-ci. La princesse ouvrit les deux battants des deux mains, et s’avança dans le couloir menant à l’escalier menant au sommet. Le rez-de-chaussée était un lieu de prière, le premier les locaux du prêtre, le second une petite bibliothèque rattachée à celle de Saint dragon, le troisième un étage de stockage, et le quatrième, vitré entre les six piliers soutenant le toit un lieu de fête, où l’Esprit de la forêt veillait bienveillant. Cet étage, hors des fêtes et évènements faisait office de lieu de méditation et de prières plus intime que la salle du rez-de-chaussée. De familles Dragonnoises réservaient cette salle pour une heure, et méditaient en famille, ou bien même un habitant de Pins-le-Temple ou le prête lui-même. La dirigeante de cette contrée s’assit en tailleur, et entra en méditation. Ses pensées étaient pleines de questions, en passant de celle revenant toujours depuis la disparition de ses parents, « sont-ils vraiment morts ? », à d’autres plus récentes, « Il y a-t-il un espoir que les Fienpoti parviennent à triompher avec l’aide de nous de la Peur ? », ou bien « Pourquoi mon pauvre chat n’a-t-il pu se remettre sur ses quatre pattes ? ». L’esprit l’aidait à méditer, lui insufflant la quiétude régnant en ces lieux, et guidant en quelque sorte ses réflexions.

Magior vit Hélène quitter la cité sur le dos d’Aurore, à vive allure. Un des conseillers de la princesse se trouvant à proximité, le Mage des Temps put lui laisser la gestion de la cité le temps qu’Hélène revienne. Le mage, après avoir brièvement parlé avec l’elfe et la fée gardant la chambre de l’hôtellerie proche de la route et du Portail où Kotoin était retenu prisonnier, afin de s’assurer que tout allait bien, ouvrit la Porte des Mondes vers les Trois-Îles, et sortit la capuche de son manteau lorsqu’il vit le temps dans la capitale de l’Archipel des Palmiers. Il emprunta le Train Magnétique où il entendit parler de la venue de la Peur dans la Salle des Trésors d’Etat, et son inquiétude naissante se transforma en angoisse lorsqu’il vit la panique régnant autour du Siège du Gouvernement, l’entrée du Consulat étant entouré de débris de verres, provenant à ce qu’il entendit de la baie vitrée du bureau de Marco de la Châtaigneraie. Le Mage des Temps se hâta de prendre un ascenseur jusqu’au bureau du Consul des Mages, malgré les demandes de diverses personnes de ne pas entrer puis de ne pas monter dans les étages, et son angoisse s’amplifia lorsque la porte de l’ascenseur s’ouvrit.

Les Fienpoti reprirent conscience un quart d’heure après avoir été propulsés par ce qui restait de l’immense baie vitrée du bureau de Marco. Ils n’avaient presque pas paniqués à l’idée de s’écraser au sol, car ils savaient que même s’ils ne maîtrisaient pas leur pouvoir de téléportation, celui-ci se manifesterai à cette occasion, come lorsque la Peur avait faillit les vaincre dans ce jour si lointain dans leur esprit, mais si proche en réalité dans le bureau du roi Jacques Rigalor. L’idée que le consul de l’Archipel des Palmiers et l’ambassadeur de l’Armont soient restés seuls avec le Mage Noir était inquiétante, mais les deux Mages des Temps arriveraient sans doute à gérer la situation. Eux, les Fienpoti, devaient s’occuper de protéger leur propre vie, qui risquait d’être écourtée, même si la Peur aurait préféré les garder vivant. Alice regarda la baguette qu’elle tenait entre les mains. Les motifs semblaient s’être légèrement effacés, chose prématurée pour cet objet acheté deux jours auparavant. Elle frotta dessus, et ils disparurent en quelques instants seulement. Elle regarda d’un air sceptique la baguette. Et elle se demanda si sa disparition puis réapparition la veille dans la villa de Marco, sa grande puissance de précision et de concentration d’énergie magique d’un mage, et les motifs faits pour durer des années s’effacer après quelques frottement n’étaient pas liés. Après cette réflexion, elle réalisé qu’elle était assise sur de l’herbe, entourée d’arbres de toute part. Le toit d’une serre visible au-dessus d’elle lui indiqua où elle se trouvait, le jardin exotique. Cela n’était pas une surprise, car comme elle et ses amis avaient atterris à la source aux quatre Fleuves après avoir vu ce nom sur une carte, ils étaient arrivés dans le jardin exotique après l’avoir vu en tombant de la tour du siège du gouvernement. Inès, Fabien et Nedjma étaient assis à quelques mètres d’elle. Un écureuil passa, et des oiseaux traversèrent en volant l’espace dégagé. Il faisait doux dans l’immense serre, malgré le froid hivernal régnant à l’extérieur, et l’averse s’abattant sur la cité. Des éclairs zébraient le ciel au nombre d’un par seconde. L’eau ruisselait sur le toit vitré à l’infini, coulait le long des parois pour tomber sur le sol. Des tuyaux permettaient de récupérer cette eau afin d’alimenter les végétaux et arbres vivant dans le jardin exotique. Les responsables de ce lieu pouvait être certains de pouvoir arroser toute la flore de la serre pendant des jours et des jours. Les Fienpoti regardaient tous le ciel, puis se rapprochèrent les uns des autres. Les regards quittèrent le haut de la serre pour se river sur la baguette d’Alice. Le Fienpoti des Plantes questionna « Es-tu certaine que cette baguette est bien la même que tu as prise avant-hier ? Car entre hier et aujourd’hui, sa puissance de concentration d’énergie magique a décuplée ! As-tu vu le trou dans le mur du bureau de Marco ?
- Je n’en suis pas certaine, répondit Alice. Les motifs ont disparu dès que j’ai frotté quelques instants, comme s’ils avaient simplement été peins dessus avec de la peinture non adaptée. Comme de la peinture à huile.
- Comme celle de Marco pour ses œuvres personnelles ? demanda Inès.
- Oui, fit Alice en regardant sa baguette.
- A croire que cette baguette a été peinte pour qu’on la prenne pour la tienne ! s’exclama Nedjma. Mais tu avais toujours ta baguette sur toi hier il me semble.
- Non, contredit la Fienpoti du Feu. Hier matin je n’arrivai pas à la retrouver, et elle est apparue plus tard à l’endroit où je l’avais laissée. J’ai simplement cru que cet élément étrange était du à la fatigue, mais on dirait bien qu’on l’a subtilisée pour la remplacer par celle-ci.
- A part Pierre et Marco, personne n’aurait pu faire le changement de baguettes, ajouta la Fienpoti de la Terre. De ce fait, je me demande si… non, cela n’est pas possible. Ils n’auraient quand même pas pensé à faire une chose aussi absurde !
- Quelle chose absurde, interrogea Fabien. A moins que… non. Non. Ils n’ont pas eu cette idée aussi stupide !
- Mais à quoi pensez-vous ? fit Inès. Ah, oui, je vois… Ne me dites pas que vous croyez qu’ils ont été assez bêtes pour effectuer cette manœuvre !
- De quoi parlez vous enfin ? demanda Alice. Mais oui ! Vous pensez que Pierre et Marco, ou l’un des deux a pensé à me confier le Bâton Noir en lieu et place de ma baguette en la peignant avec des motifs identiques pour que la Peur ne pense pas qu’on nous ait confié un Grand Trésor ! Normalement j’aurais dû la laisser avec les vôtres, et jamais le Sorcier des Ténèbres n’aurait pensé à aller vérifier si ma baguette n’était autre que le Bâton Noir déguisé. Seulement j’ai oublié de la laisser, et quand je m’en suis servi… On aura au moins appris quelle fonction autre que clef du portail de Fept en direction d’Heucalia a ce Grand Trésor. Maintenant, je crois bien que la Peur a compris, ou ne va pas tarder à comprendre aussi… Je pense que nous devrions rester cachés dans le jardin exotique, et au beau milieu des arbres le Mage Noir devrait avoir du mal à nous trouver. Déjà qu’il ne sait même pas où nous nous sommes téléportés…
La proposition fut acceptée, et les jeunes mages décidèrent que l’endroit dégagé où ils étaient serait parfait pour rester quelques heures. Après un rapide tour entre les arbres, les Quatre Sorciers constatèrent qu’une dizaine de mètres les séparaient de l’allée de promenade la plus proche. Tous les végétaux et animaux abrités dans la serre du jardin exotique n’étaient pas visibles depuis les allées. La pluie continuait à s’abattre sur les vitres de la serre, inlassablement. Les oiseaux chantaient, des chats venaient se faire caresser puis grimpaient au sommet des arbres pour s’y reposer, et les écureuils traversaient la pelouse pour se regrouper sous les arbres. Le temps passa, sans que les Fienpoti ne sachent que faire. Pierre leur avait mainte fois répété qu’ils devaient se fier à lui, que la Peur viendrait, qu’elle remporterait sûrement le combat, mais qu’ils ne devaient pas s’inquiéter. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est que Pierre comptait sur Magior…

Magior s’arrêta devant le mur à moitié détruit du bureau de Marco, essayant en vain d’entrer. Il tenta de briser le bouclier, mais sa petite taille permettait à la Peur de le rendre puissant, et de maintenir les deux Mages des Temps immobiles sur une chaise chacun. La Peur le vit, lui sourit et lui fit un geste de la main pour lui dire bonjour. Le Mage repartit, comprenant qu’il aurait du mal à entrer. Soudain, il se demanda si par les rêves il ne pourrait pas tenter de parler à Muriel pour qu’elle le conseille, ou entrer en contact avec les Fienpoti, qui peut-être avaient eu la même idée.

Les Fienpoti, après s’être concertés, décidèrent que de parler à Muriel ou à d’autres personnes via les Rêves ne serait pas une perte de temps. Au bout de quelques minutes, ils étaient dans le jardin exotique, mais en rêves. Muriel qu’ils appelèrent arriva immédiatement, la Mage des Temps s’étant par chance assoupie dans son bureau profitant d’un moment de pause, et Magior arriva également. Très vite la situation fut clarifiée : Pierre et Marco étaient prisonniers de la Peur, les Fienpoti avaient le Bâton Noir et étaient dans le jardin exotique, et Magior se trouvait à proximité du bureau de Marco. Les Grands Trésors étaient en lieu sûr, mais seul Pierre connaissait l’emplacement exact. Les anciens Fienpoti se préparaient à l’attaque du château, et le départ de la Peur en secret de l’Armont allait pouvoir être signalé par un rêve. Le cœur de l’Océan, sans doute mis par la Peur quelque part dans le château royal de Châteauor, pourrait être récupéré. Le seul moyen de faire partir la Peur du bureau étant de lui indiquer où récupérer le Bâton Noir et les Fienpoti avec.

Magior s’éveilla, revint devant l’ouverture dans le mur, et cria « Tu veux les Fienpoti et le Bâton Noir avec ?
- Pourquoi croirais-je que tu es enfin venu à la raison en m’aidant ? demanda le Sorcier des Ténèbres.
- Regarde par la fenêtre ! s’exclama le Mage des Temps. »
Le Mage Ténébreux observa la cité depuis l’ouverture de ce qu’il restait de la baie vitrée. Des lueurs apparurent dans la serre du jardin exotique. Une lueur rouge monta, puis une bleue, une verte et enfin une grise. FEPT. Les Quatre Pouvoirs et les Quatre Eléments. Les Fienpoti. Juste avant de partir, la Peur jeta une sphère noire en plein cœur de Marco, ne voulant pas s’embarrasser d’un second otage. Le Mage Noir prit Pierre avec lui, et se téléporta.

Les Fienpoti attendaient devant la grande entrée, et la Peur apparut devant eux, Pierre étant détenu en otage. Il leur réclama le Grand Trésor, Alice voulut pointer le Bâton Noir vers lui, mais il tenait l’ambassadeur de l’Armont par-devant lui. Le Mage Noir s’avança, réclamant le Bâton Noir, et menaçant de tuer Pierre. Il pouvait le faire, et il s’attendait à ce que les Fienpoti tentent vainement de l’attaquer pour libérer leur maître de la Magie avant de se résigner. Mais les Quatre Sorciers aux Quatre Pouvoirs s’en furent, et tournèrent à droite pour emprunter une allée entre des troènes. La Peur, interloquée de ce comportement, décida de courir tout en traînant Pierre. Les jeunes mages tournèrent depuis l’allée des troènes vers celle des bambous, et attendirent que la Peur arrive pour reprendre leur course. Une odeur de brûlé se répandit rapidement dans l’air, mais Inès éteignit l’incendie créé par une sphère de la Peur les visant, puis repartit à vive allure afin de rattraper ses amis. Ils empruntèrent une allée bordée d’Eucalyptus où des chatons couraient, se dirigeant vers des acacias, tandis qu’un hérisson traversait le pavage. Les Fienpoti s’engagèrent entre les Eucalyptus, envoyant en l’air des signaux lumineux pour avertir la Peur la direction à prendre pour les suivre. Celle-ci s’engagea avec une minute de retard au milieu des arbres, traînant toujours Pierre, qui tenta de se libérer, mais cela lui valut de perdre conscience grâce à violent coup sur la tête. La force physique pouvait parfois remplacer la Magie… Mais pourquoi ces adolescents s’amusaient à faire une course-poursuite ? Quelle perte de temps !

Magior s’agenouilla auprès de Marco. Il était faible, très faible, et il n’allait pas tarder à sombrer dans l’inconscience. Le Mage des Temps de Saint Dragon soulagea la douleur de celui des Trois-Îles, grâce à la Magie. Toutefois Marco continuait de sombrer peu à peu dans l’inconscience. Magior demanda doucement « Marco, où sont les Grands Trésors ? Où sont-ils ?
- Ils sont… sont dans… dans le sac qu’avaient… qu’avaient les Fienpoti, où… où ils rangeaient les Grands Trésors, murmura-t-il difficilement. Ce sac… sac est caché... caché dans le bureau de Bernard… derrière… derrière la grille d’aération…
- Merci, Marco, dit Magior.
Le Mage des Temps Dragonnois sourit à son homologue consul de l’Archipel, mais en se détournant celui-ci disparu, emporté par la crainte de la mort de Marco qui semblait très proche. Il pénétra dans le bureau de Bernard déserté par son propriétaire allé auprès du Consul des Mages. Le Consul des Niumadins possédait un bureau de la même architecture que celle de celui de Marco. Une grande baie vitrée montrait le ciel noir, qui continuait inlassablement de déverser de la pluie et des éclairs zébraient continuellement le ciel. La grille d’aération pouvant être ôtée sans devoir enlever quelques vises que ce soit, le sac où les Fienpoti avaient entreposés les Grands Trésors qu’ils avaient collectés durant leur quête était bien là. Magior devait à présent attendre que les Quatre Sorciers fassent perdre le plus de temps possible à la Peur, afin qu’à Châteauor le Cœur de l’Océan soit récupéré, et le pays libéré de l’emprise du Sorcier Noir.

Les Fienpoti traversèrent des allées, replongèrent au milieu des arbres, en s’assurant d’être suivis par la Peur, et ce jusqu’au moment où ils arrivèrent devant une sortie de service de la serre du jardin exotique. Ils sortirent, et coururent le plus rapidement possible le long de l’avenue qui longeait le côté ouest du jardin exotique. La foudre et la pluie s’étaient arrêtées, mais le ciel noir recouvrait encore la cité. Les Fienpoti coururent encore et encore vers le sud, tournèrent sur une seconde avenue vers l’est puis une troisième vers le sud, qui allait vers le Pont Continental. La Peur se téléporta devant eux, sur la route vide de toute circulation, les habitants étant restés chez eux ou a proximité de lieux publics. Un petit port se trouvait à proximité du pont, et c’est vers celui-ci que les aquisextains se dirigèrent. Arrivés sur le quai, la Peur les suivant à quelques mètres près et leur lançant des sphères esquivées par des boucliers qui se fragilisaient à chaque coup, ils commencèrent à s’inquiéter de leur sort, la course-poursuite faite pour gagner du temps allant se transformer en réelle capture. Les Fienpoti, pris de panique, montèrent sur un bateau à voile, charmant petit navire tanguant dans le petit port du sud de l’île de Gerond. La Peur arriva doucement, et sourit. Elle leur réclama le Bâton Noir, menaçant pierre toujours inconscient d’une sphère noire placée près de son cœur. Inès regarda un instant le ciel, se préparant à tenter une téléportation, proposée quelques instants plus tôt en courant sur le quai. Le mât terminé en pointe avait une lueur étrange. Inès dit « regardez ! », et tous quatre le firent. Drôle de lueur sur le fond noir du ciel nuageux. Alice murmura soudainement, se remémorant un article de météorologie lue des mois plus tôt, avant de découvrir ses pouvoirs « C’est un feu de Saint-Elme ! Mettez-vous à l’abri ! », et elle se jeta sous la table fixée sur le pont, et fut rejointe par ses amis. La Peur tenta d’en profiter pour les attaquer, ricana de leur tentative pour le distraire avec la lumière bleue mais le feu de Saint-Elme, annonçant toujours la foudre qui allait tomber en éclairant les mâts et les objets en pointe élevés, se tint à sa réputation. La foudre tomba sur un immeuble voisin, sur l’antenne de la petite capitainerie, puis sur le mât. Le mage Noir, de peur, se téléporta ailleurs par réflexe, s’étant tenu à un mètre du mât, après avoir laissé tomber le corps inconscient de Pierre. Le feu de Saint-Elme les avait aidés. La pluie repris de plus belle, et les éclairs zébrèrent plus que jamais le ciel. Fort heureusement, aucun feu ne prit, Inès et Alice y veillant par ailleurs. Le groupe se réfugia dans les appartements des propriétaires, bien à l’abri, même si le tangage leur rappelait l’endroit où ils étaient, et le corps inconscient de l’ambassadeur de l’Armont la situation dans laquelle ils étaient. Ils devaient partir. Ils songèrent au consulat, se demandant commet Marco allait.

La Peur était plus qu’un peu fatiguée lorsqu’elle arriva par téléportation devant le portail. Son instinct l’avait mené là. Elle savait que retourner au Consulat ne lui apporterai rien, le siège du gouvernement étant sans aucun doute protégé par une multitude de niumadins armés pour se battre contre elle. Et il fallait rallier Châteauor le plus rapidement possible, en se téléportant depuis Fept, or si elle retournait récupérer son otage avec les Fienpoti, elle ne pourrait pas se téléporter en Armont et posséder suffisamment d’énergie pour ne pas avoir à se reposer ce ne serait-ce qu’une heure. Heure de trop, car les Mages des Temps allaient certainement faire en sorte qu’en Armont son absence du château se sache…

Les Fienpoti envoyèrent dans le ciel des signaux multicolores, et une demi-heure après ils furent récupérés par des gardes. Ils furent conduits dans la villa de Marco, où ils se reposèrent un peu. L’issue de la révolte en Armont menée par les Fées et les anciens Fienpoti, leurs prédécesseurs, leur fut communiqué. Pierre et Marco s’éveillèrent, reprenant conscience, et apprirent eux aussi l’issue de la révolte. L’ambassadeur replongea dans le sommeil quelques minutes, la nuit arrivant, et intercepta Muriel dans un rêve. Antoine les écouta en cachette, surpris que soudainement ils reprennent leurs conversations nocturnes, sans savoir qu’ils avaient privilégié l’après-midi. Et il se réveilla subitement et retrouva Chantal pour lui annoncer l’issue des affrontements à Châteauor et à Fept. La Grande Prêtresse courut communiquer la nouvelle au Mal Suprême.

Fin de la Partie 2