jeudi 24 juillet 2008

Chapitre 12 : La Bataille de Saint Dragon

Une bataille faisait rage sur la vaste place où se situait le Portail. Un dragon passa en volant à quelques centimètres d’eux, et déchiqueta un soldat de la Peur. Toutefois, ce magnifique dragon couleur bronze qui paraissait minuscule par rapport à l’idée que pouvait s’en faire des terriens ignorant l’existence des autres mondes reçut sur son flanc une sphère grise qui le propulsa contre un gigantesque arbre, encore plus imposant que tous les autres pourtant bien plus grand que ceux de la Terre, de la Magiterrae et de la Lumière. Et une noire fut envoyée sur lui, le blessant mortellement. Les Quatre Sorciers portèrent leurs mains à leur bouche dans un bel ensemble, mais un battement de cœur après, aussi bien les soldats et mages du sorcier Ténébreux que les Dragonnois s’aperçurent de leur arrivée. Et ils furent bien évidement reconnus, et très rapidement des sphères grises furent lancées sur eux. Visiblement, l’armée de la Peur avait été informée du fait que les Fienpoti se défendaient plutôt bien, et que des sphères de propulsion étaient préférables car il valait mieux les renverser pour profiter ensuite de l’occasion afin de les neutraliser. Les Fienpoti créèrent ensemble un champ de force qui les protégea de ces sphères. Très rapidement, des soldats tentèrent de les transpercer avec leurs épées et lances, en vain. Toutefois, ce bouclier qu’ils avaient créé en criant « FEPT » était le premier de ce type qu’ils réalisaient. Et il n’était malheureusement pas très résistant. Le flot de sphères violettes envoyées contre eux ébrécha peu à peu leur bouclier. Ils avancèrent vers le milieu de la place, prolongeant le champ de force derrière et au-dessus d’eux. Une barre métallique traînait au sol, provenant sans doute de la forgerie voisine, et fut ramassée par Alice. Le bouclier éclata soudainement, les rendant vulnérables. Un soldat tenta de les assommer avec son énorme poing, mais Alice lui asséna un puissant coup sur la nuque, et un craquement sinistre se fit entendre. Fabien fit trébucher un autre soldat qui arrivait, et Inès envoya au sol un mage à l’aide d’une sphère qui fut complétée par un sort lancé par Fabien qui le maintint où il était, du moins pour quelques instants. Des Fées accompagnées par des Elfes franchirent le Portail, et bientôt une centaine de membres du Peuple Magiques étaient arrivés à Saint Dragon, et d’autres continuaient de franchir la Porte des Mondes. Les jeunes terriens furent sollicités par un Dragonnois qui leur supplia de se rendre au Palais. Ils s’engagèrent dans une allée délimitée par des bordures en pierre qui se dirigeait vers le château. Il y avait des combats de partout, et ils virent autant de soldats de la Peur que d’habitants mourir. Un mage fit une erreur fatale en ricanant à l’idée de tuer un dragon sans voir que celui-ci, à ses pieds dans un ultime effort lui déchira le cou. Les Quatre Sorciers se pressèrent vers le Palais, mais l’allée fut soudainement barrée par un groupe composé de vingt elfes, autant de fées, et une trentaine de soldats de la Peur. Le combat s’étendait sur une grande surface, au-delà de l’allée, et en même temps deux maisons prirent feu. Les jeunes mages virent un escalier qui tournait le long d’un arbre, et l’empruntèrent. Ils voulurent profiter de l’occasion pour aider les Fées et Elfes, mais ils étaient trop mêlés à leurs ennemis pour prendre le risque d’envoyer des sphères ou des sorts. L’incendie des deux maisons se propageait en hauteur, et Inès se concentra pour envoyer toutes les minuscules particules d’eau naturelle présentes dans l’air sur le feu tandis qu’Alice le maîtrisait et tentait de réunir l’énergie des flammes sur la plus petite surface possible. Mais cela n’était pas suffisant. Fabien, à travers la présence des arbres, orienta peu à peu le vent vers le feu, et l’intensifia de telle manière que les flammes se réduisirent en flammèches. Alice et Inès purent finir de l’éteindre. Nedjma les regardait faire, le pouvoir de la Terre n’étant guère utile. Une passerelle en bois reliait la petite terrasse où l’escalier débouchait à celle de deux autres maisons accolées à un autre arbre. Ils l’empruntèrent, et passèrent presque au-dessus de la bataille, et arrivèrent devant l’entrée d’une coquette taverne, nommée « Le Dragon et le Chat », désertée. Les murs en bois de chêne la rendaient accueillante et chaleureuse. La bâtisse voisine était une salle de loisirs, avec une multitude de jeux, vide elle-aussi. Une seconde passerelle les conduisit à la salle où se tenait le Conseil, en enjambant un magnifique jardin où toutes les couleurs florales étaient déclinées, ce qui ravit Fabien. Il vit depuis la passerelle une plante qui semblait « fatiguée », et il lui redonna de la vigueur. L’effet serait visible le lendemain. La porte de la salle du conseil était fermée, et un visage entr’aperçu par une des fenêtres les attira. Ils demandèrent s’ils pouvaient entrer, tout en précisant qu’ils étaient les Fienpoti, et un autre visage les observa depuis une autre fenêtre, afin de vérifier s’ils l’étaient bien. Dans cette salle occupée en son centre par le tronc du gigantesque arbre la soutenant s’étaient abrités les enfants de Saint Dragon, avec leurs grands parents, et certaines mères et certains pères. La table circulaire avait été poussée sur le côté, et les chaises données à ceux qui en avaient le plus besoin. Les personnes épuisées ou blessées qui ne pouvaient plus combattre s’étaient instinctivement dirigées vers cet endroit le plus discrètement possible. Du moins celles qui avaient encore suffisamment de forces pour cela. Après les avoir rassurés, ils apprirent que la princesse Hélène Dudragon était captive d’un sbire de la Peur. Après être ressortis, les jeunes sorciers fermèrent la porte, et se dirigèrent vers une troisième passerelle. Celle-ci conduisait à une belle maison, et une quatrième à une boutique d’alimentation. Ils passèrent au-dessus de fabriques avec la cinquième passerelle, et la sixième les emmena au deuxième étage de l’école, et en contournant celui-ci, ils en empruntèrent une septième qui finissait devant la résidence d’un dénommé Magior. La huitième descendait doucement, et allait au premier étage du Château. Au moment où ils arrivaient sur la petite terrasse devant une porte d’entrée, un homme tomba du dernier étage, au moment même où une cloche sonna douze heures. Une femme hurla de colère. Nedjma utilisa la force de la Terre pour ralentir la chute de l’homme, et les quatre Fienpoti le rattrapèrent de justesse avant qu’il ne touchât le sol. Il se releva péniblement, et leur fit signe de le suivre à l’intérieur. Une fois la porte franchie, il leur parla « Vous êtes bien les Fienpoti ?
- Oui, monsieur… ? répondit Fabien
- Georges, déclara l’homme, conseiller de la Princesse Hélène Dudragon. Elle est captive d’un certain Kotoin, qui veut le Cristal Eternel. Et il fait tuer une personne par heure qui passe sans qu’elle ait révélé où il se trouve. J’étais le premier qui était sensé mourir. Montons vite !
- Nous vous suivons, fit Alice d’un ton coléreux.
Cette colère ne s’adressait non pas envers cet homme qui venait juste de se faire jeter du dernier étage du Palais et qui repartait à l’attaque, mais envers Kotoin qui osait user de cette odieuse méthode pour obtenir ce qu’il voulait. Toutefois, le fait que Georges ait été jeté démontrait que le Princesse Hélène n’était pas prête à confier le Grand Trésor de Tropon au Sorcier Noir. Il leur fit emprunter un escalier situé derrière une petite porte en bois verni, et qui selon lui reliait directement le rez-de-chaussée aux appartements princiers en ne s’arrêtant qu’au premier étage. Ce raccourci permettait à Hélène Dudragon, qu’elle entre par la grande porte ou par celle dite de la passerelle de se rendre directement à sa chambre, expliqua-t-il aux Fienpoti. Le petit groupe gravit les marches quatre à quatre, mais ralentit juste avant d’arriver à la porte au sommet de l’escalier. Des éclats de voix filtraient à travers le battant de bois, et la détermination dans la voix féminine qui clamait haut son refus d’indiquer la cachette du Cristal Eternel était admirable. Cette jeune Princesse refusait de céder au chantage exercé par Kotoin, et faisait passer le bien-être des Cinq Mondes et de leurs habitants devant son désir de sauver la vie d’un seul individu. Choix cruel, mais sauver une vie signifiait en sacrifier des milliers. Les Fienpoti enfoncèrent la porte verrouillée de l’intérieur tout aussi bien physiquement que magiquement. Kotoin se retourna étonné, mais sa surprise fut en deux secondes remplacée par une joie malsaine. Il ricana, espérant sans doute les capturer, et au moment où les Fienpoti criaient « FEPT » pour le jeter au sol, il créa un bouclier, qui le protégea. Celui-ci disparut au même moment qu’il lança quatre sphères à la suite qui les toucha, et les jeunes mages furent immobilisés. Mais ils brisèrent le sort en une dizaine de secondes, laissant toutefois le temps au serviteur de la Peur de lancer un sort qui leur fit perdre l’équilibre. A cet instant, Hélène Dudragon l’assomma en le frappant avec le pied d’une chaise à plusieurs reprises, ne lui laissant pas le temps de réagir. Elle reposa la chaise, le gifla violemment, puis soupira, et se précipita vers son conseiller Georges, qui lui expliqua que les Fienpoti ralenti sa chute et l’avaient rattrapé. Ces derniers unirent leurs pouvoirs afin de neutraliser Kotoin, Alice fournissant l’énergie du Feu, Inès l’étendue de l’Eau Fabien l’enserrement des Plantes, et Nedjma la fixation de la Terre. Kotoin était cloué au sol, et ne pouvait user de ses pouvoirs magiques à moins de mobiliser toute sa puissance, et la question de trouver quelqu’un maîtrisant la Magie afin de maintenir le sort fut réglée lorsque les Deux Conseillers du Temple de la Forêt Ancestrale arrivèrent dans la pièce. Des bruits de lutte parvenaient depuis la fenêtre ouverte, et le fumée montait dan le ciel, mais le ciel voyait défiler des nuages noirs menaçants de laisser tomber toute leur eau. Fabien et Inès se regardèrent, et sortirent sur la terrasse. Cinq minutes après, la pluie commençait à tomber tandis que les nuages semblaient immobilisés dans le ciel. Cela ne durerait pas, mais suffisamment pour que les feux se réduisent de beaucoup. Les aquisextains étaient épuisés, mais il leur fallait obtenir le Cristal Eternel. Ce fut Alice qui s’adressa la première à la Princesse afin de lui demander où il était. La réponse fut assez surprenante : « En réalité, je ne sais pas comment faire pour vous le confier. Je sais qu’il est dans l’Arbre de Toujours, mais comment le prendre ? Magior le sait, et il était prévu qu’il m’indique comment faire lors de votre venue pour le chercher. Mes parents, avant leur disparition, ne m’avaient précisé ce ne serait-ce par hasard quelle était la marche à suivre.
- Et où est ce Magior ? demanda Alice
- Je n’en sais strictement rien, avoua Hélène. J’espère qu’il ne lui est rien arrivé pendant que j’étais ici, prisonnière à cause d’un sort de ce Kotoin.
- Un sort ? la questionna Inès.
- Oui. Il avait boqué toutes les portes et fenêtres, mais il l’avait réduit pour aller sur la terrasse.
- Je crois savoir où est Magior, dit Georges. A la fin du Conseil, il a décidé de se rendre à la Colline-aux-Chats afin de régler un problème urgent.
- A la Colline-aux-Chats ? Mais il n’était pas en train de fermer le Portail lorsqu’il s’est ouvert ? fit Hélène surprise. Et commet cela se fait-il, bien que cela ait été bienvenue, que vous soyez arrivés aujourd’hui ? Je croyais que c’était demain !
- Comment saviez-vous que nous devions venir ? questionna Fabien. Mis à part le Peuple Magique, ou du moins une petite partie, et des personnes en Lumière, ainsi que la Peur, personne ne le savait !
- Et Muriel De Potel d’Heucalia, ajouta Nedjma, qui nous a d’ailleurs dit de vous demander de nous emmener auprès de « l’un des treize ».
- L’un des Treize Mages des Temps ? Magior en est un. Je pense que nous devrions essayer de le rattraper, mais le seul moyen est de nous rendre à la colline-aux-Chats. Le moyen le plus rapide sera de passer par les airs… Suivez-moi, je vous prie. Quant à votre venue, c’est Magior qui m’avait averti ».
Les Fienpoti suivirent Hélène qui les emmenait vers un vaste espace devant le Palais, et les Deux Conseillers leurs prièrent de patienter quelques instants tandis qu’ils se téléportaient. Peu de temps après, ils arrivèrent pour signaler que les combattants de la Peur restant, ayant appris la neutralisation de leur commandant pour cette mission, s’étaient enfuis vers Fept par la Porte des Mondes. La Princesse demanda à Georges de faire venir le plus de dragons possible, parmi ceux sains et saufs, et peu fatigués. La solution de prendre une sorte de nacelle portée par une vingtaine de dragons reliés à elle par des cordes fut très vite abandonnée, car les rares aptes à voler sans difficultés étaient moins d’une dizaine. Mais les jeunes terriens n’étaient pas au bout de leurs surprises, et Quatre Sorciers se dévisagèrent lorsqu’Hélène demanda des selles…

Kotoin repris lentement conscience, et se rendit compte qu’il était prisonnier, et ne pouvait lancer de sorts. Il tenta de brise le sort qui l’empêchait de se libérer, mais il était trop épuisé pour mobiliser suffisamment d’énergie magique. En réalité, il songeait plutôt à ce que le Mage Ténébreux lui ferait subir lorsqu’il apprendra qu’au lieu de parlementer puis d’agir il avait directement envahit Saint Dragon, et avait ainsi perdu probablement la moitié de ses hommes, ou dans le meilleur des cas le quart. Que faire ?

Muriel redescendit dans ses appartements depuis le sommet de la Tour, mais son regard était toujours orienté vers le Portail. Les Fienpoti devraient arriver le lendemain à Saint Dragon, voire même le jour-même selon l’heure à laquelle ils arriveraient au Temple de la Forêt Ancestrale, et le temps qu’il faudrait pour que le Triangle des Trois Forces leur soit confié. Depuis qu’elle avait pensé aux siestes du début de l’après-midi afin de communiquer avec Magior, elle était plus tranquille vis-à-vis d’Antoine, qui possédait comme les Mages des Temps, les Fienpoti et quelques sorciers parmi les plus puissants, ainsi que le Peuple Magique sous une certaine forme, le don de communiquer par les rêves. Si jamais il découvrait qu’il était plus que probable qu’il soit un des Mages des Temps… L’ouverture du Portail était imminente, plus qu’une question de jours. Muriel songea une fois de plus à tenter de le débloquer et de l’ouvrir vers la Cité aux Fées par exemple, mais elle savait que c’était impossible. En vérité, c’était elle qui avait partagé la clef spirituelle du Portail d’Heucalia en chacun des Grands Trésors, et avait expressément ordonnée avant sa fermeture qu’ils ne devraient être réunis que lorsque la situation serait trop dangereuse. Elle avait en quelque sorte mentit lorsqu’elle disait aux Fienpoti qu’elle ne voulait pas ouvrir le Portail afin d’éviter que la Peur puisse venir dans Heucalia. Mais il ne fallait pas qu’ils croient que la situation soit perdue si le Mage Noir parvenait à réunir lui-même tous les Grands Trésors. Car cela serait le cas, ou du moins il serait difficile de sauver Heucalia en plus des Cinq Mondes de la Peur.

Charles Rigalor revenait au château depuis la bibliothèque où il avait passé sa matinée à parler de littérature avec Julien. La conversation de ce jeune bibliothécaire était très agréable, et ce qui était appréciable était le fait que le fait d’appartenir à des mondes différents n’était pas un obstacle pour discuter à propos de divers récits provenant de mondes différents, car les Portails laissaient régulièrement passer de mondes en mondes des ouvrages. Le Prince de l’Armont croisa sa sœur dans une petite rue en compagnie de Louis, et après avoir échangé quelques mots, il poursuivit son chemin en direction du Palais. Il alla dans le jardin, et admira une fois de plus la vue qui s’offrait à lui. La ville s’étendait tout autour, mais le jeune Armonois dût interrompre sa contemplation car la pluie commença à s’abattre sur la cité grandiose. Charles fut content d’avoir un manteau suffisamment épais pour pallier à la température assez froide. En quelques minutes, la pluie se transforma en neige, et peu à peu une tempête s’installe sur la capitale. Un manteau blanc recouvra Alider. Marine et Louis étaient rentrés au Château dès que les flocons s’étaient faits nombreux, et la famille Rigalor réunie dans le salon avec la famille Nollio. Ce qui était une tempête en fin de matinée devint un blizzard en fin d’après-midi, et il était impossible de voir par les fenêtres l’extérieur tellement les flocons aux formes complexes et uniques étaient proches les uns des autres.