samedi 13 septembre 2008

Chapitre 14 : Le Secret de l'Arbre

De rares dragons tournoyaient dans le ciel de Saint Dragon tandis que de nombreux Dragonnois s’étaient réunis sur la place de l’Arbre et du Portail. Des dragons étaient allongés au sol, et se faisaient guérir par les habitants de la capitale. Des Fées circulaient sur les ponts tandis que les elfes patrouillaient dans les maisons, mesurant l’étendue des dégâts. Les incendies avaient tous été éteins par la pluie qui s’battait sur la cité. Magior se plaça devant l’Arbre, face aux Dragonnois, et déclara qu’il viendrait aider en priorité ceux les plus gravement blessés, mais qu’il devait toutefois d’abord remettre le Cristal Eternel aux aquisextains. Les Fienpoti le suivirent en direction de l’arbre devant lequel de Mage des Temps s’arrêta. Il récita en direction de l’arbre « Arbre de Toujours, révèle tes secrets, et permet l’accès à ton cœur », tout en posant ses deux mains sur deux nœuds alignés. Ces deux nœuds s’éloignèrent doucement l’un de l’autre tandis que le tronc s’ouvrait en bas, révélant de fines marches descendant en colimaçon. Quelques instants après, l’arbre redevint immobile, et les cinq mages purent descendre l’escalier de bois, Magior en tête. Une lueur émanait dans l’arbre, venait du sommet loin au-dessus d’eux, éclairant l’escalier. Celui-ci tournait le long de l’épais tronc, mais la largeur relativement petite des marches permettait d’avoir un espace au centre, laissant la lumière arriver dans la caverne souterraine où arriva le petit groupe. Dans celle-ci était stocké de nombreux coffres, tous fermés et scellés. Au centre de la caverne reposait sur un piédestal en pierre blanche un cristal de la taille d’un poing, et qui brillait de mille feux. La luminosité venait d’un dragon, taillé à l’intérieur du Cristal Eternel. Ce Grand Trésor particulier avait été nommé « Cristal Eternel » pour la simple raison que, comme l’Arbre de Toujours, il avait été dans cette caverne depuis la fondation de Saint Dragon. On racontait qu’un dragon rouge, à l’origine des liens forts entre humains et ces êtres merveilleux était mort, et que à l’endroit où il reposait s’était dressé l’Arbre de Toujours, et que le seul fruit qu’il n’ait jamais fait était le Cristal Eternel. Cette légende affirme même que si le Cristal venait à être détruit, l’arbre en offrirait un autre. Magior expliqua brièvement aux Fienpoti Qu’ils devaient, au moment de s’endormir, songer à Muriel, à la tour d’Heucalia, et surtout de créer le rêve où la conversation aurait lieue. Expliquer comment procéder était très difficile, mais les Quatre Sorciers n’eurent aucun mal à s’endormir en songeant au sommet de la Tour d’Heucalia, et en quelques instants ils furent dans le rêve, et Muriel arriva par l’escalier. Elle les regarda, puis les invita à parler.
« Nous avons le Cristal Eternel en plus du Triangle des Trois Forces et de l’Arbre d’or, déclara Fabien. Et nous allons aujourd’hui même récupérer le Grand Trésor de Xétou.
- Je suis vraiment surprise que vous ayez trois Grands Trésors en si peu de temps ! s’exclama Muriel. A vrai dire, je pensais plutôt que vous n’arriveriez à Saint Dragon que demain !
- Heureusement que nous sommes arrivés en avance ! dit Alice. Kotoin a lancé une offensive une heure avant notre arrivée. Je crains que la situation ne fût catastrophique si nous avions respecté vos prévisions…
- Vous savez, déclara la mage, je suis vraiment contente pour vous que vous progressiez aussi rapidement. Et également sur le plan magique. C’était votre première tentative de créer un rêve ?
- Oui, acquiesça Inès.
- Je vous félicite ! Moi-même, sans vouloir me vanter, et n’ayant aucune raison de le faire par ailleurs, qui suis pourtant très puissante, et connue jusque dans le monde de Jiriond pour ma grande force magique, j’ai dû essayer deux à trois fois par jour durant cinq jours. Vous serez très puissants, et pas que parce que vous êtes les Quatre Sorciers aux Quatre Pouvoirs. Toutefois, il faudrait que vous demandiez à Pierre Monbikand qu’il vous dise tout ce qu’il s’est passé il y a treize ans. Et sachez qu’en vérité je ne peux réellement ouvrir le Portail, et que je vous avais laissé l’idée que ne pas réunir les Grands Trésors ne condamnait pas Heucalia, car j’aurais toujours pu ouvrir le Portail vers un monde sûr, tout en conservant quelques risques. Sachez que, si la Peur possède tous les Grands Trésors, cela marquera l’arrivée de ce monstre dans mon monde. Rendez-vous rapidement à Xétou, et mettez au point avec Pierre un plan pour récupérer le Cœur de l’Océan. C’est une pierre semblable à un saphir taillé en forme de cœur, mais quand vous le regardez, vous aurez l’impression que des vagues se déplacent à l’intérieur. Simple effet d’optique, mais qui vous permettra de le reconnaître.
- Vous avez parlé avec Pierre ? s’enquit Nedjma.
- Bien sûr !
- Serait-il un Mage des Temps ? voulut savoir Inès.
- C’est à lui qu’il faut poser cette question. Il vous expliquera tout. Toutefois, je vous demande de ne pas tarder, bien que ce conseil soit futile. Bonne chance. »

Les Fienpoti s’éveillèrent, prirent le Cristal Eternel, puis allèrent s’enquérir de Magior, qui s’attelait à la guérison des blessés les plus gravement touchés. Le Mage des Temps se dépêcha après avoir appris que le Mage Ténébreux était à Xétou, et dès qu’Hélène Dudragon arriva, Magior ouvrit le Portail, et le petit groupe arriva aux Trois-Îles, sachant que cette fois-ci le nombre de combattants ne déterminerait pas le vainqueur, mais la discrétion et l’intelligence. Seize heures étaient sur le point de sonner…

Marco De La Châtaigneraie était Consul des Mages depuis un an déjà, et devait sa position dans le gouvernement surtout par sa grande connaissance des Cinq Mondes, et de la Magie, ainsi que de la politique. En dehors de la Terre, la sélection des ministres, conseillers et autres hauts fonctionnaires ne se basait non pas sur les partis politiques, qui par ailleurs n’existaient nulle part ailleurs, mais sur les compétences des hommes et femmes qui dévouaient leur vie au bien-être de leur peuple. Marco, âgé seulement de vingt-six ans comme Pierre Monbikand, avait en deux ans seulement de vie active, atteint les sommets. Son mandat ne devait s’achever que dans six ans, mais il pouvait tout aussi bien être réélu que de laisser sa place plus tôt. Et même lorsqu’il devrait quitter son poste, il était assuré de retrouver sa place dans le Conseil acquise un an auparavant, et de redevenir Consul une ou deux décennies après. Les cheveux courts couleur châtain, les yeux verts en amande, et se tenant en permanence droit, d’une grande taille, d’un regard et d’une démarche assurée, le Consul des Mages était voué à un avenir d’exception. Bernard Jokiliardo, Consul des Niumadins, était lui en poste depuis six ans. Ils descendirent tous les deux par le même ascenseur, et se séparèrent après que le Consul des Niumadins ait salué Pierre Monbikand, et promis de s’occuper de l’affaire de la Peur dès qu’il aurait réglé un problème avec le maire des Trois-Îles concernant une tempête prévue trois jours plus tard sur la capitale. L’un des avantages de gouverner à deux était de pouvoir partager la gestion des problèmes, et de veiller efficacement au bien-être de la population. Cela expliquait sans doute le succès de ce mode de gouvernement aussi bien à Xétou que chez le Peuple Magique pour chaque Cité ou Temple. Après avoir échangé quelques banalités plus pour permettre à Pierre de réfléchir quant à comment présenter la situation que par politesse et amitié, bien que les deux hommes soient amis d’enfance. Une fois l’ascenseur arrivé au trentième étage, le dernier, et la porte du bureau de Marco fermée, Pierre put aller droit au but : « Marco, je dois t’informer, comme tu le sais sûrement, que la Peur, après treize ans d’absence après son échec contre le roi Jacques Rigalor, est revenue à la charge, et est cette fois parvenue à prendre possession de l’Armont. Mais là n’est pas la plus important, bien que finalement l’inverse aurait été mieux. Non, le vrai problème est que Muriel de Potel, qui gouverne Heucalia, a pris contact via un rêve avec les Fienpoti, afin de leur révéler comment parvenir à Heucalia, autrement dit en réunissant les Grands Trésors. Malencontreusement, un des serviteurs du Mal suprême a surpris ce rêve, et s’est bien évidemment empressé de tout rapporter à son maître qui a transmis le moyen d’accès à Heucalia au Sorcier Noir.
- Muriel a révélé aux Fienpoti que la Peur doit absolument être vaincue à Heucalia ? s’enquit le jeune Consul.
- Non, pas vraiment, heureusement. Que feraient-ils s’ils apprenaient que la Peur doit être vaincue dans le monde des esprits, monde où elle pourrait puiser beaucoup d’énergie ? Les Cinq Mondes, en plus de deux millénaires, ne se sont pas montrés capables de reformer une Grande Alliance, dont les Grands Trésors sont les seuls vestiges… Et le sont-ils aujourd’hui encore ? Enfin, Muriel leur a laissé entendre que le moyen de vaincre le Mage Ténébreux était de refaire ce qui a été défait, et elle leur a conseillé de venir la voir afin de leur révéler ce qui doit être fait en détails. Là, ils apprendront tout.
- Si seulement Muriel pouvait ouvrir en toute sécurité le Port ail ! Mais nous savons bien que les anciens Fienpoti ont protégé Heucalia en ne rendant ce monde uniquement accessible que par la Porte de Fept il y a des dizaines d’années. Enlever ce blocage puissant car scellé avec le Peuple Magique et les Mages des Temps, du moins une partie, reviendrait à permettre au Mal Suprême d’ouvrir le Portail de Jiriond vers ce monde ! Dire qu’on avait que dix-sept ans à ce moment-là, lorsque l’avenir des Cinq Mondes s’était un peu obscurcit !
- Et des futurs Mages des Temps en formation, compléta Pierre.
- Donc, si j’ai bien compris, récapitula Marco, il faut que je prenne le Bâton Noir dans la Salle des Trésors d’Etat, que je le confie aux Fienpoti, et que nous allions à Fept afin d’aller à Heucalia, et d’y faire venir la Peur pour la vaincre là-bas. Mais seule une Grande Alliance pourra la vaincre définitivement.
- C’est cela même. Mais je me demande si les Cinq Mondes seront prêts. Même si ce n’est pas le cas, je pense qu’on pourrait envoyer la Peur à Jiriond pour bien un siècle vu la puissance régnant à Heucalia!
- Pierre, n’as-tu pas peur que les Fienpoti connaissent le sort qu’ont subit leurs prédécesseurs ?
- Je veillerai à ce qu’ils ne se croient pas plus puissants qu’ils ne le sont, déclara Pierre avec détermination. J’y veillerai… Dès que mes élèves seront arrivés aux Trois-Îles, je leur révèlerai tout ce qu’ils doivent savoir. Le Mage Ténébreux ne gagnera pas ! nous n’avons pas droit à l’erreur, car si le Portail de Fept a vu l’accès à Heucalia soumis à la condition de réunir les Grands Trésors, c’était bien parce que les Quatre sorciers n’étaient, magiquement, plus en état de défendre ce monde !
- Tout aurait été parfait si ce serviteur du Mal Suprême n’avait appris que le moyen qu’on avait trouvé pour protéger Heucalia était les Grands Trésors, soupira le Consul. Mais, heureusement, Muriel, toujours égale à elle-même, a usé de mystère et n’a pas révélé que la Grande Alliance doit être reformée au sommet de la Tour pour que la Peur disparaisse…»
Le Consul des Niumadins les rejoignit deux heures plus tard, et très rapidement toute la population du monde de Xétou fut alertée. L’ambassadeur de l’Armont se vit confié le Bâton Noir qu’il cacha en lieu sûr, après avoir mis au secret Marco et Bernard.

Les anciens Fienpoti voyaient les jours défiler, inlassablement, et cette attente d’un évènement quelconque faisait remonter des souvenirs douloureux.
La Place du Portail de Fept était devenue un véritable champ de bataille, où serviteurs de la Peur et du Mal Suprême s’affrontaient. La Porte des Mondes était ouverte vers Jiriond, seul monde dont le Portail n’était pas contrôlable par les Fienpoti. Ceux-ci étaient dans le château à Châteauor, où la Peur tenait dans ses bras le jeune Charles, qui venait de fêter ses un ans avec sa fausse jumelle Marine. Celle-ci était dans son berceau, derrière le Mage des Ténèbres. Il avait mis en place un bouclier, et souriait devant les parents royaux éplorés en voyant une lame noire de poignard collée contre la gorge du jeune Prince. Sa sœur subirait certainement le même sort. Leur mort, ainsi que celle de leurs parents, était le plus vif souhait du Mal Suprême, pour une raison bien particulière… Les Fienpoti s’étaient téléportés depuis Fept, épuisant ainsi une quantité non négligeable d’énergie magique. Ils brisèrent le bouclier, réduisant encore leurs ressources toutefois supérieures à celles de la quasi-totalité des mages de l’Univers. Le duel commença, et le jeu était clair : celui qui gagnerait aurait la vie des enfants royaux entre les mains…
La Peur commença à envoyer des sphères noires, devant ralentir les mouvements des Quatre Sorciers. Elles furent déviées. Les Fienpoti ripostèrent à l’aide de sphères des quatre couleurs de leurs pouvoirs, qui devaient ensemble ralentir et affaiblir le Mage Noir. Elles disparurent contre un mur devant lequel se tenait la Peur un instant auparavant. Elle s’était téléportée à l’arrière des sorciers, et ils ne purent éviter les sphères les ralentissant. Ils furent également victimes de sort réduisant leur énergie, mais la téléportation de leur ennemi lui avait également ôté des forces. Le Mage Noir trébucha sur un jouet, et se retrouva affaibli par un sort, et peu à peu les Fienpoti l’immobilisèrent, souffrant toutefois de blessures affligées par leur adversaire. Mais les ressources de la Peur étaient importantes, et ce furent les Quatre Sorciers qui se retrouvèrent peu à peu immobilisés, et la douleur infligée par le Sorcier des Ténèbres était sur le point de franchir la limite supportable. Les Fienpoti firent alors appel à l’énergie complète de leurs rochers respectifs à Fept, et la Peur fut sur le point d’être détruite. Presque. Mais elle ne pouvait mourir que par une seule chose, qui n’était pas un duel magique. Les Fienpoti étaient à leur maximum, et seule leur énergie vitale aurait pu augmenter leur puissance. Mais cela n’était pas nécessaire, et ils étaient certains de pouvoir renvoyer la Peur à Jiriond pour trois siècles. Jassifiadine et Blimont arrivèrent, et cirèrent aux sorciers de stopper. Mais le fait que la Peur ait fait couler un peu de sang du coup de Charles les mit hors d’eux. Le prince fut d’ailleurs jeté en l’air par le sorcier, et fut rattrapé par l’Elfe et la Fée qui utilisèrent un sort pour ralentir sa chute, et c’est en douceur qu’il se posa à côté du Mage des Ténèbres.
A Fept, les quatre rochers tremblèrent de plus en plus. La totalité de l’énergie emmagasinée était utilisée, et même plus. Les rochers se brisèrent soudainement, et il fallait de l’énergie magique pour qu’ils se réparent d’eux-mêmes. Les Fienpoti à Châteauor sentirent soudainement que leur énergie vitale était aspirée. Ils résistèrent, et ce fut leurs pouvoirs qui furent aspirés. La Peur tomba au sol, et se téléporta à Fept avec l’énergie qui lui restait, et s’en fut vers Jiriond par le Portail, tout en remarquant que les pierres étaient fissurées, et les cassures brillaient tout en se réparant. Trop d’énergie magique avait été mobilisée par les Quatre Sorciers aux Quatre Pouvoirs, et cela avait été fatal. Les Quatre Pouvoirs étaient annihilés. Un désastre, et Muriel décida, après avoir appris que les protecteurs de l’accès à Heucalia, possible que par Fept, n’avaient plus leurs pouvoirs de Fienpoti, fit réunir les Grands Trésors, et avec un sort puissant consolidé par les Mages des Temps qui avaient pu être réunis, transforma les Cinq Grands Trésors en clefs devant nécessairement être réunis afin d’accéder au monde des Esprits. La Porte des Mondes de la Ville des Quatre Pouvoirs se referma. Quelques mois après, deux Mages des Temps décédèrent à trois semaines d’intervalle, et Pierre ainsi que Marco prirent la relève. Quant aux Fienpoti, les futurs à venir n’étaient alors âgés que de un an environ, et ne furent retrouvés que treize ans plus tard par Pierre, devenu ambassadeur de l’Armont peu avant.
Mais certains pouvoirs, tels que la téléportation, la création de rêves, et leurs pouvoirs hors ceux qu’ils avaient quand ils étaient Fienpoti étaient toujours en leur possession. Toutefois, se téléporter à Fept dont le Portail était contrôlé plus que jamais, ou vers la Cité aux Fées dont la Peur avait empêché l’accès en faisant créer un champ de force par ses mages. Mais par les rêves, peut-être qu’ils pouvaient agir…